Après-midi shopping avec Béa, qui a, en fait, immédiatement bifurqué vers le Louvre. La dernière fois qu’on a bu quelques verres, je me suis un peu (trop) laissé aller, je lui ai raconté les musées (bon, vraiment que les musées): «l’appât-amorce-ferrage-et-prise en une leçon» (cf. cahier 22?). Depuis, elle m’en rebat les oreilles. J’ai dit OK, de toute façon, je m’étais grillée toute seule et Béa n’est pas une sainte-nitouche. Je lui ai donc fait une démo vite fait (juste la première étape), avec un Francophone (peut-être un Suisse), 35 ans, cravate et trois-pièces, le genre qui profite d’une heure entre deux rendez-vous pour inscrire une culturalité à la rubrique choses faites de son palm. Il mord à l’hameçon en deux œillades, il est mûr après une salle et demie, mais je le laisse là. «Faut avoir un certain aplomb,» dit ensuite Béa. Faut aimer ça. «Et pas avoir peur de se faire jeter.» Ça n’arrive pas: si on appâte, on prend.
J’en dis le moins possible.
J’en dis déjà trop.
Je ne vomis plus, je prends des vitamines, des jus. Je vais bien.
«Bon, pas pour longtemps», menace l’enfoiré qui me sert de marionnettiste.
Papa très évasif. Il refuse de parler des «changements» et de sa «nouvelle vie», à Mado et à Maman. «Non, non, elles ont bien le temps.» Puis plus tard, toujours avec son air «je ne souffre pas vraiment, il ne faut rien exagérer»: «Un jour on en guérira. Ce jour-là, je leur dirai.» Et moi, je suis sensée porter ça toute seule?
Dîner au restau du Rond-Point (au moins ai-je échappé à la pièce), avec Mado et son maître-amant Milo. Intéressant personnage. Pas du genre à me passionner avec ses considérations qui se veulent pleines d’esprit sur tout et rien, et s’émaillent d’anecdotes théâtreuses, mais l’homme est galant, soucieux du bien-être de ma sœur, et par effet rebond, du mien. En échange de quoi, nous sommes censées jouer notre rôle de public, donner la réplique – ce que fait très adroitement ma sœur. Dans leur genre, ils forment un couple parfait.
L’endroit hésite entre une cantine de standing bruyante et un bar américain, effets de lumières et claquement des glaçons dans un shaker. On s’embrasse, on se reconnaît. A plusieurs reprises, on salue Milo. Et à chaque fois, il explique sans fin les connections qui font que ces deux-ci, ces trois-là, ont monté ensemble «une pièce tout à fait étonnante». Mado est tout sourire, docile et ronronnante, qui ouvre de grands yeux, bois les paroles du maître et glousse d’un rire adolescent. Pour ma part, il y a déjà un moment que je suis en mode economy.
Un verre, pour finir, avec Pierre (comprenez: Richard), le Grand Blond, etc. L’antithèse de Milo: un homme discret, drôle malgré lui, d’une classe folle sous son air ailleurs. Un Anglais, qui fait ses lumières, l’accompagne. Il joue avec un médiator en fumant, il a l’air de se faire encore plus chier que moi. J’envisage de nous détourner tous les deux de cette effervescence de salon pour une effervescence façon «libidineux spectacle vivant». Mais il me coupe l’herbe sous le pied en disparaissant avec son talkie-walkie comme s’il y avait la guerre dehors.
Alors qu’il n’y a même pas de taxi.
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